Rupture

Quand on rencontre une personne, c’est un peu comme se tenir dans l’escalier de la vie… nos expériences diffère, parfois cette personne est sur une marche plus haute, parfois sur une marche plus basse, et parfois même, nous partageons la marche. Quand je l’ai rencontré, il était là-haut sur sa marche… on a échangé, on s’est parlé, on s’est rencontré et ce qui devait arriver arriva, on a décidé de faire un p’tit bout de chemin ensemble et commencé à se fréquenter…

Il avait la sagesse des hommes ayant du vécu, la bonté innée, une ouverture et une culture à rendre jaloux, mais surtout, surtout, il semblait avoir un passé réglé. Un passé bien réglé, quoique fissuré. J’enviais son cheminement, son gros bon sens, il était si résilient, inspirant. Inspirant pour moi qui sortait écorchée d’une relation effilée et ombragée. J’en étais marquée, mais résignée à me soigner.

Il était la personne parfaite pour m’accompagner, me redonner une confiance envers les hommes, les relations. Il était bon; bon pour moi, patient, compréhensif, aimant… Il m’avait donné envie de devenir une meilleure personne. J’avais envie d’être en mesure de lui offrir le genre de relation dans laquelle lui me comblait. Tellement, telllllement que j’ai compris que mes blessures le blesseraient lui et que tant que je ne les guérissais pas, il en écoperait. Je devais lui offrir plus, il le méritait.

Malheureusement, ce qui ne devait pas arriver arriva, et ses vieilles blessures se sont heurtées aux miennes… un mal-être planait sur notre relation et j’en étais responsable. Notre belle relation, parce que c’en était une belle, était malade, et j’étais porteuse de l’odieux. Je me voyais stagner en le regardant monter l’escalier…

Parfois aimer veut dire reculer, prendre le temps de se soigner, de panser ses blessures. Parfois reculer veut dire renoncer à une personne, pour ne pas la blesser davantage, parce qu’on ne pense pas la mériter, parce qu’on craint ne lui apporter que de difficultés. Parfois on prend du recul pour guérir et mieux revenir, être capable de redonner à l’être aimé, être capable d’être aimé, être capable d’aimer…

C’est sans doute très difficile à accepter que d’être quitté pour ces raisons. C’est surement très frustrant d’aimer une personne qui fait le choix de s’aimer elle-même assez pour se respecter, s’éloigner et se soigner. C’est surement plus facile de la détester je réalise, beaucoup plus facile la mépriser je constate, que de l’aimer et faire sa part pour se soigner soi-même, sans garantie que ce sera assez pour un jour se retrouver.

Je n’avais pas anticipé être la cible de méchancetés, de malhonnêtetés, de dénigrement et d’attaques; les hostilités de la guerre quoi! Je n’avais pas anticipé être accusée d’avoir profité, froissé, niaisé, remplacé, voire même oublié… Je n’avais pas envisagé être bafouée pour avoir aimé, maladroitement j’en conviens, mais tout de même, avoir respecté l’intégrité de la personne aimée. Je n’avais pas prévu être accusée de l’avoir grossièrement abandonné, moi qui aie pourtant tout essayé pour le garder à proximité, dans mon clan protégé, privilégié.

Je n’avais pas imaginé que son passé fissuré contenait autant d’amertume, d’acidité. Mais ce que je n’avais surtout pas prévu c’est d’être en cours de guérison, montant doucement les marches, en le regardant derrière moi, me rabaisser et me mépriser, pour m’avoir respecté. En lui j’avais vu grand, un grand homme. Il m’aura appris que parfois, la grandeur est de reconnaitre notre petitesse, notre fragilité, et d’aller au-devant de soi pour s’aider soi, se guérir…

encensée

Au premier mot, j’avais déjà manqué le deuxième. Avalée par le timbre de voix. Je me berce. Il parle. Mon regard valse entre les trésors oubliés et son sourire. À travers, quelques phrases manquées. Les heures passent et l’état second m’enlace. Mes sens s’emballent et s’imaginent passer la nuit là, à entendre. Ses mots sont musicals. 

La nuit est longue, mais calme. Ses mots m’effleurent l’esprit telle la délicatesse d’une main sur ma cuisse. Son épaule, légèrement découverte, laisse entrevoir l’encre qui y est déposée. Je suis les lignes au rythme de sa lente respiration et jalouse qu’elles soient si près de son odeur. Je l’imagine narrateur de mon quotidien: « Elle se leva, déposa sa tasse avec fermeté, ramassa ses clés et referma derrière elle. ». De la musique au quotidien.

Enivrée, 
nuit insensée
Sens rythmés,
Ivres de sensibilités.
Imprégnée sans difficultés et
Touchée sans l’avoir été.

Yuè Xià Lǎorén 月下老人

Ça n’avait rien d’un flirt.

Dès la première rencontre, le jour même suivant le premier contact, il s’est montré différent de tout autre homme. Ce qui devait être un p’tit café sans prétention, pour la forme, s’est avéré une volteface à mes jugements et une belle leçon d’humilité. Il était doux et robuste, gentil bien que direct, petit mais si grand.

Quand j’étais enfant, grand-maman m’avait dit que lorsque je rencontrerais le bon pour moi, le vrai, le miens, je le saurais sans me poser de questions. En cours de route, les amies, la famille, la société aura fait bousculer la base pour y insérer les préjugés. Les « Il doit être éduqué, avoir un bon emploi, il doit être grand, intelligent, tes amies doivent l’aimer, ta mère l’adorer, porter tes sacs, t’ouvrir la porte… »

Dès la deuxième rencontre, j’ai ressenti le potentiel qu’il soit le bon. Je l’ai senti dans la facilité à échanger les banalités, apprendre à se connaitre. Je l’ai senti dans ses questions posées et mes réponses écoutées, mais je l’ai senti surtout dans l’aisance de nos silences. Le vent dans le dos, la face au soleil…

Quand j’étais enfant, on m’avait laissé entendre qu’il m’offrirait des fleurs à la St-Valentin, des bijoux aux anniversaires, des cadeaux sans raison, que pour me gâter, me choyer. On m’avait dit qu’il me ferait la cour, me couvrirait de compliments, m’apporterait en voyage…

Dès la troisième rencontre, j’avais compris que c’était lui. Je n’ai pas eu à attendre les sorties et les cadeaux, j’ai su qu’on était plus que ça dès le départ. Lui, c’est son cœur qu’il m’a offert. Je ne suis pas que tombé en amour, je suis tombée en amitié, en complicité. Avant même de caresser ma peau il avait touché mon âme. Avant même d’avoir dormi à ses côtés il m’invitait à traverser la tempête, et c’est le plus naturellement du monde que j’acceptais.

Quand j’étais enfant, on m’a bourré de mensonges. On a essayé d’apposer à l’amour les excuses qui servent à couvrir nos échecs. On décore nos espoirs avec des bijoux et des fleurs pour se faire accroire qu’on a réussi où tellement ont échoués. J’ai échoué souvent, péniblement, et lui aussi. On a échoué au point de ne vouloir rien de moins que du vrai. Ce qui est imparfait mais qui ne laisse pas place à l’interprétation, au vertige, mais qu’au vestige du mariage de grand-maman, celle qui m’a si sagement et si simplement dit que je saurais…

Aujourd’hui je sais, je l’ai senti dans son regard quand il me demandait d’être patiente, je l’ai senti dans la tendresse de son étreinte quand j’ai pleuré ma frustration. Je l’ai senti dans la douceur de sa main qui caresse la mienne, dans la ferveur de sa bouche quand il m’embrasse, je l’ai senti dans sa voix quand il m’a dit Je t’aime…

La volupté de rubens

Je me souviens encore du banc de bois sur lequel j’attendais qu’on me choisisse dans une équipe, l’odeur de la salle de gym ou la texture du linoléum vert. Très jeune, j’ai compris que j’étais mise de côté parce que j’étais la grosse de la classe. Je n’ai jamais été de taille avec personne. J’étais pointée du doigt par toi et tu continues de me pointer du doigt parce que je te dérange. Parce que tu ressens le besoin de te sentir au-dessus de moi. Tu t’expliques mal pourquoi il me choisit à toi, parce qu’en l’accusant de ne pas avoir de goût, tu te sens mieux dans ta peau. C’est plus facile pour toi de me jeter des pierres plutôt que d’accepter que nous avons autant de valeur l’une que l’autre et d’accepter qui tu es.

Il préfère glisser sa main contre ma cuisse généreuse ou ma poitrine voluptueuse et tu me vois comme un piètre choix parce que tu ne t’aimes pas. Le temps que tu as perdu à te comparer aux autres femmes, je l’ai passé à savourer mes courbes devant le miroir, à explorer toutes les facettes de ma sexualité et à m’épanouir dans les plaisirs de la chair avec tant d’aisance que les ampoules se sont changées plus vite que les saisons. Quand ses coups de hanches se brisent sur mon rocher, mes rondeurs vibrent comme des vagues dans tous les sens. Quand ses doigts se creusent dans ma chair, il ne juge pas, il savoure ma générosité.

Toutes ces années passées à laisser fleurir les graines que tu as semées par lâcheté, mes pétales se sont épanouies et l’acceptation de chacune de mes courbes n’a eu que de la bienveillance à offrir aux femmes qui ont manqué d’eau. Aux hommes, elles offrent aisance, élégance, concupiscence, et ce, sans besoin de médisance sur les tiennes.

Je n’ai jamais été de taille à juger, mais j’ai toujours su que la vie était trop bonne pour être savourée avec ménagement. Les hommes aiment les rondes, mais c’est plus facile de t’imaginer qu’ils manquent de jugement que d’accepter qu’ils peuvent aimer une autre personne que toi.

Lettre à toi, l’autre femme…

Celle qui m’en veut d’aimer son homme, celle qui m’en veut d’avoir pris sa place. Celle qui me voit comme sa rivale, ce que je ne suis pas; celle qui me voit parce que ça l’arrange bien, d’être celle qui a détruit son couple…

Autant j’ai de défauts, je n’ai pas ceux dont tu m’accuses. J’ai de la bienveillance pour toi, et j’en ai, parce que j’ai été à ta place aussi. Parce que je comprends que dans une situation où une personne est si profondément blessée qu’elle en perd ses repères, personne n’en sort gagnant. Parce que je sais que toute la colère que tu projettes vers lui en ce moment est en faits de la déception, de la peine et un grand sentiment d’échec amoureux.

Autant que je voudrais lui promette que je ferai mieux, que je serai à la hauteur, autant je pelte du vent. J’ai compris y’a longtemps que nulle n’est à l’abris de cette peine; jamais! Parce que la vie nous projette son lot de défis dans la lenteur du quotidien… Parce que la vie nous trompe l’œil dans son regard… Parce que la vie nous apprend parfois si cruellement la vie.

Autant tu peux m’en vouloir, autant tu es responsable, vous êtes responsable de votre malheur; nous le sommes tous. Peut-être parce que le temps nous apprends qu’il faut prendre le temps, j’ai appris que le temps fuit. J’ai appris à mes dépends, à grands coups de déceptions et d’échecs, que quand la vie nous sert ses fruits, il faut les saisir et les déguster. C’est ce que j’ai choisis de faire avec l’homme que tu as aimé, avec l’homme que tu as quitté.

Sache que je saurai avec grâce défendre sa valeur. Où tu jugeais que je serais déçue, je saurai l’honorer. Je choisirai de l’élever à se respecter et à relancer ses projets enfouis, faute de motivation. Je lui offrirai de nouvelles perspectives à ses mille et un projets. Je l’accompagnerai dans ses nouvelles opportunités à se dépasser, à se retrouver, à s’aimer, et ça, j’en suis assurée, c’est ce que tu aurais souhaité pour lui…

En finalité, sois assurée qu’avant tout, je vais l’aimer… Je vais l’aimer comme s’il m’était prêté, ce qu’il est en réalité… Je vais l’aimer comme j’aurais dû aimer dans le passé, comme j’aurais aimé être aimé. Je vais l’aimer en toute sincérité, en toute simplicité!

Flirter L’absence

Quand tu m’envoie un message pour m’interdire de flirter avec ton homme, ton ex; t’es consciente que c’est peut-être lui qui flirte avec moi? Tu y’a pensé à ça?

Tu réalises que tout le courage que tu as rassemblé pour m’écrire cette lettre, je la détruis en trois coups de langue. Ton insécurité et ton manque de confiance en toi sont si palpable que te répondre sans vouloir t’épargner, tu prendrais trois ans à t’en remettre…

Ne pas vouloir te préserver je te dirais qu’il m’a caressé dans l’entrée, il m’a embrassé dans la verrière, il m’a baisé entre la cuisinière et la fenêtre basse, oui oui, celle-là même avec vue sur le voisin, et je l’ai terminé goulûment en le suçant sur le canapé!

Je n’ai même pas osé entrer dans la chambre, et ce par respect pour toi, pour ce qui fût jadis votre intimité. Et toi, tu t’obstines à me l’énumérer, me nommer vos ébats, me décrire tes tourments. Pendant que tu l’as toujours dans ton lit, c’est à moi que tu penses en te demandant s’il pense à moi; celle que tu nommes rivale! Même en sa présence tu es lamentablement absente…

…il flirte avec moi pendant que tu flirtes dans l’absence…

Une année à s’aimer



Il y a une année…
cœurs ébréchés
corps carencés
profils croisés

Quelques lignes échangées
des paroles partagées
l’espoir s’est pointé
la rencontre est fixée

Un grand doux, réservé
d’allure allumé
des gestes posés
une oreille disposée

Des sorties insoupçonnées
de nombreuses randonnées
nos soupers improvisés
des discussions bien arrosées

D’une belle générosité
la sagesse durement gagnée
un insécure inassumé
d’une douce sensibilité

Des jours à s’apprivoiser
les nuits à se posséder
nos corps entremêlés
deux esprits débauchés

Son désir de m’épauler
sa crainte d’être abandonné
Mon besoin de l’aimer
ma peur d’être contrôlée

Les blessures du passé
troublées, sont ravivées
un coup dur porté
à toute notre fragilité

Nos âmes indisposées
guérison proposée
question de s’assurer
d’un peu de sérénité

Seule façon de prouver
combien je peux l’aimer
est d’enfin lui accorder
son besoin d’être libéré

Libéré de m’aimer
incapable de quitter
toxique réciprocité
ce désir de s’épargner

profils croisés
corps ébréchés
cœurs carencés
d’une année à s’aimer…

Sapiomonarquofile

Une année d’absence, mais ils sont toujours là, prêts à éclore. Nous nous sommes laissés sans raisons valables, laissant les cocons assoiffés. Il n’a suffit que de quelques échanges pour les humidifiés assez pour ranimer un souffle. Fragiles et déconcertées, vivantes et envieuses à nouveau, les chenilles ont repris vie.

Ces moments à refaire le monde, à imaginer la vie, à échanger rires et regards, à vivre le moment sans penser aux obligations. Quand le temps s’arrête prend tout son sens maintenant. Cette facilité, toute en douceur, est enivrante. Nous sous-estimons parfois l’importance de la réciprocité dans le lien qui unit deux personnes, mais c’est là la meilleure nourriture de l’âme. La simple vue d’une note, d’un regard, de mots ou de musique m’émoustille. Les papillons s’émancipent. La lenteur du déploiement des ailes mérite patience et importance.

Le grand Monarque parcourt plus de 4000km chaque 6 mois pour suivre sa destinée. Il rejoint son clan en affrontant obstacles et intempéries. Malgré les pertes, il avance. N’est-ce pas là une grande leçon de résilience?

Go fish!

Comme un poisson dans l’eau tu t’amuses avec moi
Déjà hameçonnée tu te permets de me laisser aller 
Sans d’autres intérêts tu joues à me ramener
Qui sait, au pire je serai mise sur la glace…

Tu veux garder ta liberté, n’accepte pas de t’engager
T’es tellement occupé à tout gérer; continuant de magasiner

Si par malheur je tire sur la ligne
Tu joues à la retirer sans donner signe
On avance à tâtons
On nage à reculons

Paroxysme de ta séparation, j’engourdis ta guérison
Moi et mes dispositions; non pas sans raison

T’as juste à jeter ta ligne à l’eau
Nul besoin d’y voir bien loin
Entre Zoosk, Tinder et POF
Pleins d’autres poissons vont mordre l’hameçon

Rien de bien ambigu, tout est stable
Je ne suis qu’utilité si je te laisse me manipuler…

*Image, La femme poisson de Sophie Pigeon