Je me souviens encore du banc de bois sur lequel j’attendais qu’on me choisisse dans une équipe, l’odeur de la salle de gym ou la texture du linoléum vert. Très jeune, j’ai compris que j’étais mise de côté parce que j’étais la grosse de la classe. Je n’ai jamais été de taille avec personne. J’étais pointée du doigt par toi et tu continues de me pointer du doigt parce que je te dérange. Parce que tu ressens le besoin de te sentir au-dessus de moi. Tu t’expliques mal pourquoi il me choisit à toi, parce qu’en l’accusant de ne pas avoir de goût, tu te sens mieux dans ta peau. C’est plus facile pour toi de me jeter des pierres plutôt que d’accepter que nous avons autant de valeur l’une que l’autre et d’accepter qui tu es.
Il préfère glisser sa main contre ma cuisse généreuse ou ma poitrine voluptueuse et tu me vois comme un piètre choix parce que tu ne t’aimes pas. Le temps que tu as perdu à te comparer aux autres femmes, je l’ai passé à savourer mes courbes devant le miroir, à explorer toutes les facettes de ma sexualité et à m’épanouir dans les plaisirs de la chair avec tant d’aisance que les ampoules se sont changées plus vite que les saisons. Quand ses coups de hanches se brisent sur mon rocher, mes rondeurs vibrent comme des vagues dans tous les sens. Quand ses doigts se creusent dans ma chair, il ne juge pas, il savoure ma générosité.
Toutes ces années passées à laisser fleurir les graines que tu as semées par lâcheté, mes pétales se sont épanouies et l’acceptation de chacune de mes courbes n’a eu que de la bienveillance à offrir aux femmes qui ont manqué d’eau. Aux hommes, elles offrent aisance, élégance, concupiscence, et ce, sans besoin de médisance sur les tiennes.
Je n’ai jamais été de taille à juger, mais j’ai toujours su que la vie était trop bonne pour être savourée avec ménagement. Les hommes aiment les rondes, mais c’est plus facile de t’imaginer qu’ils manquent de jugement que d’accepter qu’ils peuvent aimer une autre personne que toi.